Ennemis naturels

INTRODUCTION A LA LUTTE BIOLOGIQUE

Outre tous les organismes nuisibles mentionnés dans ce guide, il existe également beaucoup d’organismes qui aident à combattre les ennemis de cultures: Ce sont les auxiliaires ou ennemis naturels. Ceux-ci vivent aux dépens des ennemis des cultures, par exemple en les dévorant ou en les parasitant. La lutte biologique peut être définie comme un phénomène naturel ou, plus activement, comme une mesure appliquée. Dans ce dernier sens on peut la définir comme l’utilisation d’auxiliaires, afin de réduire les dégâts causés par des ennemis des cultures à un niveau économiquement acceptable. La lutte biologique, qui préconise l’emploi d’agents très spécifiques, ne peut être considérée comme une panacée universelle susceptible de protéger toute culture contre tout ennemi. C’est pourquoi aujourd’hui, la mise en oeuvre de ce concept s’inscrit systématiquement dans le cadre de la lutte intégrée. Dans ce chapitre, le rôle que jouent les auxiliaires dans la suppression des populations de ravageurs est expliqué. De plus, quelques exemples sont donnés des groupes d’auxiliaires les plus importants.

Pour expliquer les effets des applications de pesticides sur les auxiliaires et leur rôle dans l’équilibre biologique, il faut d’abord mettre en évidence le mécanisme par lequel les ravageurs et leurs auxiliaires interagissent. Dans ce qui suit, ce mécanisme est décrit d’une manière simplifiée en ce qui concerne la relation entre un ravageur et son prédateur, mais un mécanisme semblable s’applique également à la relation entre un ravageur et son parasitoïde.

Dans les champs il y a un certain équilibre entre les nuisibles et leurs ennemis naturels. Il s’agit d’un équilibre dynamique qui fluctue dans le temps. Lorsque le nombre de ravageurs augmente, il y a plus de nourriture disponible pour les prédateurs. Cette situation favorise leur multiplication et attire des prédateurs volants. Ainsi, le nombre total de prédateurs devient si important que les populations du ravageur diminuent nettement. Après un certain laps de temps, les prédateurs ne trouvent plus suffisamment de proies de telle sorte que la plupart d’entre eux meurent ou s’en vont à la recherche d’endroits plus favorables. Les quelques ravageurs qui restent peuvent alors se multiplier facilement. En principe, on a là un cycle éternel de fluctuations des populations de ravageurs et d’auxiliaires. Toute modification de cet équilibre dynamique, par exemple par un traitement chimique inconsidéré, peut entraîner de graves répercussions.

Outre les dangers qu’ils présentent pour la santé de l’homme, les pesticides présentent l’inconvénient de tuer, outre les ennemis des cultures, leurs ennemis naturels. L’effet immédiat de leur application est une réduction (presque jamais une élimination) des nuisibles, mais également des auxiliaires. Les ravageurs qui ont survécu au traitement se retrouvent dans une situation où ils peuvent augmenter leur nombre sans être gênés par des auxiliaires. En outre, les auxiliaires sont en général plus sensibles aux résidus de pesticides sur la plante que les ravageurs: Leur grande mobilité provoque un contact plus intensif. Cela aboutit à un abaissement parfois considérable du taux de multiplication des auxiliaires et à une mortalité de ceux-ci plus élevée que la normale. Cela entraîne un accroissement des populations des ravageurs, qui peuvent atteindre des niveaux préjudiciables aux cultures, ce qui provoque de nouveau l’exécution d’un traitement, etc.

Il est donc préférable de choisir des méthodes de lutte qui épargnent les auxiliaires afin qu’ils puissent aussi contribuer à la lutte contre les ennemis des cultures. A cet effet, on recommande l’utilisation de pesticides sélectifs, ou rendus sélectifs par des astuces de formulation telles que la microencapsulation. Un pesticide sélectif ne tue que les ravageurs concernés et non les auxiliaires. L’application d’extraits de neem, par exemple, atteint principalement les ravageurs et non leurs ennemis naturels parce que les matières actives contenues dans ces extraits n’agissent principalement qu’après ingestion. Citons également comme exemple le Pirimicarb, qui est très sélectif contre les pucerons. On peut rendre sélectifs certains pesticides en pratiquant des applications ciblées dans des endroits ou à une période où seuls les ravageurs visés seront atteints. Citons aussi les insecticides systémiques, qui circulent dans la plante et qui sont donc uniquement ingérés par les ravageurs, les traitements de semences, et les granulés ou poudres d’insecticides déposés dans les cornets de maïs ou de sorgho pour lutter contre les foreurs de tige.

 

GROUPES D’AUXILIAIRES

Les ennemis naturels des ravageurs sont des prédateurs, des parasitoïdes et des pathogènes. Un prédateur est un auxiliaire qui s’empare d’autres organismes pour s’en nourrir et qui en tue plus d’un au cours de sa vie. Les prédateurs dévorent leurs proies en les mangeant ou en les suçant. Un parasitoïde est un arthropode parasite seulement aux stades immatures, qui détruit son hôte au cours de son développement et qui vit à l’état libre lorsqu’il est adulte. Les adultes des parasitoïdes pondent donc leurs oeufs dans ou sur leurs victimes, qui finalement seront tuées par les larves qui en éclosent. La distinction entre prédateurs et parasitoïdes n’est pas toujours très facile à faire et, avec les différentes espèces, on passe insensiblement d’une catégorie à l’autre. Jusqu’à présent, les parasitoïdes ont constitué le groupe le plus important pour la réalisation d’une lutte biologique efficace, suivis par les prédateurs. Il existe une gamme si large d’ennemis naturels que l’on ne peut traiter ici que les plus grands groupes écologiquement les plus importants.

Acariens

Beaucoup de familles d’acariens comprennent des prédateurs, qui se nourrissent d’une large gamme d’acariens et de petits insectes. Les familles les plus importantes sont les Phytoseiidae, les Hemisarcoptidae, les Cheyletidae et les Pyemotidae. Les phytoséides s’attaquent aux acariens nuisibles de la famille des Tetranychidae et des Eriophyidae, mais nombre d’espèces peuvent se nourrir de petits insectes, tels que le premier stade mobile de cochenilles, et même de pollen, comme source alternative de nutrition. Plusieurs espèces des genres Phytoseiulus, Amblyseius, Typhlodromus et Metaseiulus sont très efficaces pour lutter contre les tétranyques de différents systèmes agro-écologiques. Quelques-unes ont été utilisées dans la lutte biologique appliquée. L’Acarien jaune commun et Tetranychus cinnabarinus, par exemple, sont combattus par un acarien prédateur vorace, Phytoseiulus persimilis. Un adulte de ce prédateur est capable de consommer une trentaine de proies par jour de différents stades. Toutefois, pour maintenir une fécondité acceptable des femelles de P. persimilis, il faut une humidité relative dépassant 50%, ce qui rend leur utilisation moins efficace dans les conditions arides. Il existe, par contre, d’autres acariens prédateurs, qui sont plus adaptés à une humidité rélative faible.

Araignées

Ce groupe d’arthropodes comprend plus de 30.000 espèces connues, presque toutes étant des prédateurs d’insectes. Dans la lutte biologique les araignées ont été négligées, probablement parce qu’elles sont des prédateurs non spécialisés. Une araignée donnée attrape plusieurs espèces, proportionnellement à leur nombre au champ. Pourtant, les araignées peuvent être un groupe important dans certains systèmes agro-écologiques, surtout dans les systèmes non perturbés par des insecticides. Quoique les espèces, prises individuellement, soient incapables de lutter efficacement contre un ravageur donné, une association de plusieurs espèces peut avoir un net effet stabilisant sur les populations de ravageurs.

Coléoptères

Les coléoptères comprennent beaucoup de familles contenant un grand nombre d’espèces prédatrices. Les principales familles prédatrices sont les Cantharidae, Carabidae, Cicindelidae, Cleridae, Coccinellidae (bêtes à Bon Dieu), Dysticidae, Gyrinidae, Histeridae, Hydrophilidae, Lampyridae, Meloidae, Silphidae et Staphylinidae. Les coccinelles et les carabides sont les familles les plus importantes pour la lutte biologique contre les ravageurs. Surtout avec les coccinelles, on a obtenu des résultats remarquables. Les carabides sont des coléoptères nocturnes, qui courent au ras du sol et qui se nourrissent généralement de proies à corps mou, telles que les chenilles, les asticots et les limaces.

Beaucoup d’espèces de coccinelles sont des prédateurs de pucerons, cochenilles, tétranyques ainsi que d’oeufs et de petites larves de beaucoup d’autres ravageurs. Les adultes, en général de forme hémisphérique, présentent selon l’espèce des colorations orange, rouge, jaune, gris ou noir et sont pourvus le plus souvent de taches de couleurs contrastées rouge, jaune, noir ou blanc. Ce sont des coléoptères relativement petits, de 1,5 à 6,0 mm de long (voir Fig. 109, page 282).

Fig 109 Alesia striata, Thea variegata, Hyperaspis senegalensis

Fig. 109 Quelques exemples d’adultes de coccinelles prédatrices sahéliennes. De gauche à droite: Alesia striata, Thea variegata et Hyperaspis senegalensis

Les femelles pondent 200 à 500 oeufs jaunes en petits groupes. Les larves sont de forme allongée, s’effilant à l’arrière. Leur couleur est généralement foncée, avec des taches plus claires, et leur corps est recouvert de soies rigides (voir Fig. 110, page 282). A la fin de leur développement larvaire, elles s’attachent avec l’extrémité de l’abdomen à la plante, puis chrysalident. A quelques exceptions près, les adultes aussi bien que les larves sont des prédateurs voraces. Par exemple, les larves peuvent consommer 11 à 25 pucerons par jour, tandis que les adultes peuvent en dévorer 16 à 56.

Larve de coccinelle

Fig. 110 Larve de coccinelle

La coccinelle Cryptolaemus montrouzieri, originaire de l’Australie, est un prédateur efficace des cochenilles farineuses du genre Pseudococcus et Planococcus. Elle a été utilisé contre la Cochenille farineuse des agrumes, Planococcus citri. Cette cochenille est une espèce cosmopolite, qui est également répandue en Afrique à l’exception des zones arides et semi-arides. Comme la coccinelle est assez sensible au froid, elle ne peut pas survivre pendant l’hivernage dans de nombreuses régions subtropicales. C’est pour cette raison qu’elle doit y être lâchée de nouveau au début de chaque saison chaude. Pourtant, elle est un agent efficace de lutte biologique, qui peut facilement être élevé en masse.

Diptères

Parmi les mouches parasites, le groupe le plus grand et le plus utilisé dans la lutte intégrée appartient à la famille des Tachinidae. Celle-ci comprend à la fois des espèces très spécifiques et polyphages. Leurs hôtes sont principalement des chenilles et des coléoptères adultes de Scarabaeidae, de Chrysomelidae et de Carabidae. La sous-famille des Exoristinae est la plus importante tant économiquement que numériquement. Elle inclut beaucoup de genres attaquant des ravageurs. La sous-famille des Tachininae est principalement constituée d’espèces qui parasitent des foreurs des tiges ou des chenilles qui se cachent autrement qu’en creusant des galeries dans les tiges des plantes.

Un certain nombre de familles de Diptères est entièrement prédateur. Tant les adultes que les larves peuvent être des prédateurs. Parmi les familles les plus communes et économiquement les plus importantes citons les Syrphidae, les Cecidomyiidae, les Bombyliidae, les Calliphoridae et les Sarcophagidae. Les trois dernières familles comprennent un nombre assez grand d’espèces qui s’attaquent aux masses d’oeufs de criquets.

Les larves de syrphides sont des prédateurs communs et voraces, surtout des pucerons. Leurs apparences et habitudes diffèrent considérablement d’une espèce à l’autre. La longueur d’un asticot mature peut varier de 6 à 19 mm. Leur corps allongé est généralement pointu vers la tête et large et arrondi à l’arrière. Les asticots se rencontrent régulièrement dans les colonies de pucerons où ils se déplacent lentement en dévorant des pucerons. Ils les percent avec leurs mandibules pointues et sucent le contenu de leur corps. Un asticot peut ainsi dévorer quelques centaines de pucerons par jour.

Larve attaquant un puceron

Fig. 111 Larve d’un cécidomyiide attaquant un puceron

Les cécidomyiides incluent nombre d’espèces dont les asticots dévorent des pucerons, cochenilles, mouches blanches, thrips et acariens, surtout les oeufs et les jeunes stades larvaires. Les asticots sucent parfois le sang des membres de leurs victimes (voir Fig. 111, page 283). Les adultes, qui sont petits, ne sont pas des prédateurs. Quelques espèces sont élevées en masse pour une utilisation dans la lutte biologique. On utilise par exemple Aphidoletus aphidimyza contre les pucerons.

Entomopathogènes

Les insectes et les acariens sont, comme les vertébrés, susceptibles à toute une gamme de maladies. Les micro-organismes qui les attaquent ont des cycles de vie identiques à ceux des pathogènes qui s’attaquent aux autres animaux. Pourtant, à l’exception des rickettsies, aucun des pathogènes d’arthropodes n’a été signalé chez l’homme, raison pour laquelle on peut les appliquer contre les ennemis des cultures sans danger pour la santé de l’applicateur ou du consommateur. Les bactéries, les champignons, les virus et les nématodes constituent quelques groupes importants d’entomopathogènes. Ces maladies se rencontrent dans la nature, mais quelques espèces sont également élevées en milieu artificiel semi-industriellement pour un usage contre les ravageurs.

Les bactéries sporigènes du genre Bacillus sont les micro-organismes les plus importants pour la lutte biologique. Leurs spores résistantes leur permettent de survivre longtemps hors du corps d’un hôte. Bacillus thuringiensis (Bt) est l’exemple le plus connu, et plusieurs préparations à base de souches de cette bactérie sont disponibles pour la lutte contre une grande variété de chenilles et autres ravageurs dans nombre de cultures. Les différentes souches de Bt sont efficaces contre différents insectes. Bacillus thuringiensis var. tenebrionis, par exemple, est très efficace contre certains coléoptères. Un autre exemple est Bacillus sphaericus qui produit des toxines qui présentent une haute efficacité contre les larves de moustiques.

L’application de champignons dans la lutte biologique est encore restreinte. Leur développement exige en général la présence d’eau libre ou d’une humidité relative élevée. Leur utilisation tend donc à se limiter à des conditions humides. En revanche, les champignons ont l’avantage d’attaquer également des ravageurs suceurs, qui se trouvent souvent à l’abri des micro-organismes parce qu’ils ne les ingèrent pas. Les champignons entomophages pénètrent le plus souvent dans leurs victimes par le tégument et les stigmates, et leur ingestion n’est donc pas nécessaire pour obtenir une infection. Par contre, ils sont généralement moins spécifiques que les virus et les bactéries. Le champignon Metarhizium flavoviride est utilisé contre les acridiens. On a développé une méthode de production et de formulation qui permet de pulvériser ses spores sur les cultures envahies par les criquets. Quelques jours après l’application de la formulation les criquets commencent à mourir.

Posture chenille morte baculovirus

Fig. 112 Posture typique d’une chenille morte à cause d’un baculovirus

La plupart des virus qui s’attaquent aux insectes se différencient des virus des plantes ou des mammifères par le fait que les particules virales se trouvent encapsulées dans une enveloppe de protéine, appelé le corps d’inclusion. Les baculovirus sont le groupe le plus important et ils sont caractérisés par des particules virales en forme de bâton (voir page 263). Les baculovirus incluent les virus à polyédrose nucléaire et les virus à granulose. Les virus à polyédrose nucléaire présentent de grands corps d’inclusion de forme polyédrique, contenant de nombreuses particules virales. Les virus à granulose possèdent de petits corps d’inclusion de forme ovale, contenant une seule particule virale. Ce sont surtout les stades larvaires d’insectes qui sont sensibles aux virus (voir Fig. 112, page 284). Les adultes peuvent véhiculer les virus et les transmettre par leurs oeufs ou par leurs fèces mais ils ne présentent que rarement des symptômes graves.

De nombreux nématodes sont des parasites d’insectes. Quelques espèces sont ingérées par leur hôte, d’autres pénètrent activement dans l’hôte par les stigmates ou directement par le tégument. Quelques-unes, comme celles des Mermithidae, sont des parasites obligatoires, qui se développent dans l’hôte vivant et le tuent en émergeant. D’autres, comme les Steinernematidae et les Heterorhabditidae sont des parasites facultatifs. Ils introduisent, en pénétrant dans leur hôte, des bactéries symbiotiques du genre Xenorhabdus, qui se multiplient et qui tuent l’hôte en 48 heures. Puis, les nématodes se développent durant plusieurs générations dans le cadavre de l’hôte, se nourrissant des bactéries. On a obtenu de bons résultats au champ avec des nématodes entomopathogènes, mais leur développement est surtout favorisé par des conditions humides, ce qui rend difficile leur utilisation dans le Sahel.

Hétéroptères

Bien que cet ordre soit principalement phytophage, un nombre considérable d’espèces de plusieurs familles s’est spécialisé pour devenir prédateur. Parmi celles-ci, il y a beaucoup de punaises qui s’attaquent à des ravageurs d’importance économique et quelques-unes sont utilisées par l’homme dans la lutte biologique. La plupart des Myridae, Anthocoridae et Reduviidae, par exemple, se nourrissent aux dépens d’insectes vivants. Les punaises prédatrices percent leurs proies avec leur trompe et sucent leur sang.

Vue latérale de la tête d’une réduvide

Fig. 113 Vue latérale de la tête d’une réduvide

Les réduves se reconnaissent à leur corps en général allongé, et surtout à leur trompe qui est épaisse et courte. La pointe atteint la partie antérieure du prothorax, tandis que celle des autres familles est plus grêle et se prolonge très loin en arrière, parfois jusque sur l’abdomen (voir Fig. 113, page 285). Les anthocorides sont particulièrement utiles parce qu’ils s’attaquent à beaucoup d’arthropodes nuisibles, telles que des pucerons, des cochenilles, de petites chenilles et des acariens phytophages. Quelques espèces du genre Orius sont élevées et commercialisées pour la lutte contre des thrips, chenilles, homoptères, hétéroptères et acariens.

Hyménoptères

L’ordre des hyménoptères comprend les insectes les plus utiles à l’agriculture. La plupart des parasitoïdes hyménoptères sont spécifiques de certains hôtes déterminés: Ils parasitent seulement un genre ou même une espèce hôte.

Oviposition Trichogramma

Fig. 114 Oviposition d’un Trichogramma sp. dans un oeuf d’Helicoverpa

Les trichogrammes sont des parasitoïdes d’oeufs. Ce sont de très petits hyménoptères (0,3 à 1,0 mm de long), dont plusieurs espèces sont élevées à une échelle commerciale, afin de lutter contre des lépidoptères, tels que, par exemple, Helicoverpa armigera, Pectinophora gossypiella, Agrotis spp. et certains borers des tiges (voir Fig. 114, page 286). Dans une ponte groupée de lépidoptères, on peut reconnaître les oeufs parasités par la couleur foncée qu’ils prennent après un certain temps. La plupart des trichogrammes sont des parasitoïdes solitaires: De chaque oeuf parasité ne sort qu’un nouvel adulte. Selon l’espèce, une femelle peut parasiter 200 à 400 oeufs. Les parasitoïdes d’oeufs sont efficaces en vue de prévenir des dégâts à une culture donnée, car chaque oeuf parasité correspond directement à une diminution des populations de chenilles nuisibles susceptibles d’éclore.

Un autre type d’hyménoptères parasites est celui des parasitoïdes de larves. On peut distinguer des ectoparasitoïdes et des endoparasitoïdes. Les ectoparasitoïdes pondent leurs oeufs sur l’hôte et les larves qui en sortent, restent fixées sur leur peau (voir Fig. 115, page 286). Ils complètent leur développement à l’extérieur de l’hôte.

Larves d’un ectoparasitoïde grégaire sur une chenille de Spodoptera sp.

Fig. 115 Larves d’un ectoparasitoïde grégaire sur une chenille de Spodoptera sp.

Les endoparasitoïdes pondent leurs oeufs dans l’hôte et leur développement a donc lieu à l’intérieur de l’hôte (voir Fig. 116, page 287). Beaucoup d’endoparasitoïdes provoquent la momification de leur hôte quand ils ont complété leur développement larvaire. Cela est particulièrement visible chez les pucerons parasités, dont le tégument devient distendu, dur et de couleur jaune-paille (voir Fig. 117, page 287). Chez beaucoup d’endoparasitoïdes de larves, le nouvel adulte n’émerge de l’hôte que lorsque celui-ci est au stade nymphal. Dans ce cas, la larve parasitée continue donc de s’alimenter bien que sa consommation soit moindre que celle d’une chenille saine.

Cycle d’un endoparasitoïde solitaire

Fig. 116 Cycle d’un endoparasitoïde solitaire dont la nymphose a lieu à l’extérieur de l’hôte

Parasitoïde émergeant d’un puceron momifié

Fig. 117 Parasitoïde émergeant d’un puceron momifié

Un exemple d’endoparasitoïde est Epidinocarsis lopezi, un parasitoïde de la Cochenille farineuse du manioc. Cette Cochenille farineuse, provenant de l’Amérique du Sud, a été introduite par accident au Zaïre en 1973. En quelques années elle a envahi une grande partie de l’Afrique, parce qu’elle n’y a pas rencontré d’ennemis naturels efficaces. On a alors cherché et trouvé des ennemis naturels en Amérique du Sud. Dans les essais préliminaires, E. lopezi paraissait le parasitoïde le plus prometteur. On l’a lâché pour la première fois en 1981 au Nigéria. C’est devenu une grande réussite: Vers la fin de 1990, le parasitoïde s’est établi dans 17 pays africains. A l’heure actuelle, la cochenille se répand encore en Afrique, mais le parasitoïde la suit et effectue une lutte biologique très efficace.

Il existe également des hyménoptères qui sont des parasitoïdes de nymphes. Ils pondent leurs oeufs dans les chrysalides ou dans les pupes de leurs hôtes (voir Fig. 118, page 288). Bien qu’ils détruisent ainsi beaucoup de chrysalides et de pupes de ravageurs, on peut dire que leur effet utile pour la culture concernée vient en général trop tard: Les larves nuisibles, qui sont transformées en chrysalides ou en pupes, ont alors déjà effectué les dégâts. Tout de même, les parasitoïdes de nymphes contribuent à une réduction des populations de ravageurs adultes de la prochaine génération, ce qui diminuera donc également le nombre de larves nuisibles.

Parasitoïde de pupes de diptère

Fig. 118 Parasitoïde de pupes de diptère

Les guêpes maçonnes constituent un groupe d’hyménoptères de taille assez grande. Elles construisent des nids en terre dans lesquels elles déposent des chenilles et d’autres insectes pour la nourriture de leurs larves. Les guêpes maçonnes ne sont pas très sélectives, puisqu’elles chassent des chenilles appartenant à des espèces très différentes.

Névroptères

Larve d’un névroptère

Fig. 119 Larve d’un névroptère

La plupart des espèces de cet ordre sont des prédateurs. Bien que tant les adultes que les larves soient carnassiers, ce sont surtout les larves qui dévorent de grandes quantités de proies. Les larves possèdent de longues mandibules courbées, qu’elles utilisent comme une pince pour tenir leurs victimes et pour sucer leur sang (voir Fig. 119, page 288). Elles ressemblent superficiellement aux larves de coccinelles, mais s’en distinguent par leurs mandibules typiques. Les Hemerobiidae et surtout les Chrysopidae sont les familles de névroptères les plus importantes pour la lutte biologique. Elles attaquent beaucoup de ravageurs différents, incluant des cochenilles, des pucerons, des mouches blanches, des acariens et d’autres insectes à corps mou, ainsi que leurs oeufs.

Adulte d’un Chrysopidae

Fig. 120 Adulte d’un Chrysopidae

Les adultes des chrysopes sont vert clair tandis que ceux des hémérobes sont brunâtres. Leurs yeux sont généralement très saillants. Les antennes sont très longues et grêles. Les ailes, longues et larges à nervures nombreuses, sont incolores ou légèrement verdâtres chez les chrysopes et brunâtres chez les hémérobes (voir Fig. 120, page 289). Les oeufs de chrysopes sont ovoïdes et portés de façon caractéristique par un pédicelle. Ils sont pondus en petits groupes sur le dessous des feuilles. Les adultes de quelques chrysopes qui se nourrissent partiellement de miellat peuvent être attirés vers une culture par l’application d’un miellat artificiel, constitué d’un mélange de sucre, d’hydrolysats de levure, et d’eau. Les chrysopes attirés ainsi passent plus de temps dans le champ traité et pondent davantage d’oeufs, augmentant ainsi avec le temps le nombre des larves.

 

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